Près de 200 propriétaires britanniques et irlandais ont porté plainte suite à l’achat d’une résidence de tourisme en France. Ils s’estiment victimes d’un démarchage commercial agressif et trompeur. L’affaire est suivie par la Commission européenne et par la DGCCRF.
Ils rêvaient de s’offrir un peu de «joie de vivre» à la française, ils ont plutôt eu droit à «l’horreur». C’est en tout cas ainsi qu’un groupe de propriétaires irlandais de résidences de tourisme en France s’estimant floués ont sous-titré leur site Internet: «Joie de vivre or horreur». Leur but? Fédérer un maximum d’autres propriétaires afin de porter l’affaire et ses subtilités juridiques et fiscales devant les autorités françaises et européennes.
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Selon eux, la présentation qui leur a été faite du système français des résidences de loisirs gérées (french leaseback, pour les anglophones) a été trompeuse et ils s’estiment aujourd’hui prisonniers d’un système kafkaïen. Ils se rendent compte que les loyers «garantis» ne le sont pas et peuvent fondre en même temps que les charges s’envolent, sans compter les impôts locaux. Ils découvrent que les indemnités d’éviction peuvent coûter très cher et se retrouvent en conflit avec des gestionnaires parfois indélicats sans pouvoir du tout profiter de leur logement dans certains cas ni le quitter sans y laisser des plumes.
Intimidation et discrimination
La situation de Paul et Breda Jordan figure ainsi parmi les 217 dossiers irlandais que la DGCCRF doit examiner. Le couple avait acheté en 2006 un appartement dans le Domaine des Fontenelles en Vendée. À l’issue du bail de 9 ans, estimant qu’une clause stipulait qu’il n’y aurait pas d’indemnité à verser en cas d’abandon du gestionnaire (Eurogroup Vacances devenu Madame Vacances), le couple se fait aider d’un avocat français pour mettre fin au contrat. On leur conseille alors d’attendre deux ans pour que le gestionnaire puisse réagir… Ils estiment avoir été victimes de manœuvres d’intimidation et de discrimination de la part de leur gestionnaire ne leur versant plus de loyers durant ces deux années. De guerre lasse, les propriétaires décident de changer la serrure de leur appartement et se voient désormais menacés d’une action en justice de la part du gestionnaire.
Une situation qui met ces Irlandais en difficulté financière pour leur prêt principal sachant qu’ils continuent à rembourser leurs mensualités françaises. Mais surtout ils se sentent «perdus, sans indication claire sur la manière de sortir de cette situation» et amers de se sentir victimes d’une vente abusive «avec l’évident soutien de notaires, agents immobiliers et gestionnaires».
3000 signatures pour une pétition
De son côté, Jennie Molphy, une autre ressortissante irlandaise, vit une histoire assez similaire. Elle a opté pour un achat sur plan dans le Languedoc au sein des Jardins de Saint-Benoît, lancés par le groupe Garrigae. Un achat signé pour 225.000 euros avec un retour «garanti» de 5% et une période de 9 ans qui se finit à la fin de cette année. Les choses n’ont pas tardé à se dégrader quelques années après la signature avec des loyers divisés par deux et des charges doublées à en croire Jennie Molphy. Là aussi, elle voit mal comment se dégager de la situation, avec l’arrivée d’un nouveau gestionnaire désigné par la justice après les déboires financiers du premier. Car là encore, les indemnités d’éviction ne seraient pas négligeables. Elle se désole d’autant plus qu’un logement comparable au sien est parti en vente judiciaire pour 40.000 euros.
Tout en se félicitant que cette situation soit examinée par la DGCCRF, elle place assez peu d’espoir dans ce recours. «Cet examen me semble biaisé par le fait que cette structure doit examiner une situation qui résulte d’un dispositif d’incitation fiscale à la construction validé par le ministère de l’Économie dont dépend la DGCCRF», écrit-elle au Figaro immobilier. Elle n’en reste pas moins confiante dans un début de mobilisation sur ce sujet. La pétition qu’elle a lancée pour obtenir justice pour les propriétaires floués rassemble déjà près de 3000 signataires (Irlandais pour un tiers, Britanniques pour un autre, le reste étant constitué d’autres nationalités européennes dont des Français). Elle compte notamment sur les instances européennes pour faire un peu le ménage dans une formule trop opaque à ses yeux et qui donne une très mauvaise image de la France.